Mixtape
Contexte : Eté 2007
Il fait chaud, vous êtes sur le sol à guetter la brise d'air frais qui passe par la fenêtre. Au loin, les cigales, quelques voitures ou le bruit des vagues. Des vacances qui ont un goût d'adolescence. Vous allez dans la cave pour fuir la chaleur caniculaire. Et là, dans un carton, vous trouvez une vieille GameBoy. Il y a une disquette qu'on a laissée dans la console tout ce temps. Aucun moyen que ça marche quand même, pas vrai ?
Et pourtant, la console s'allume. Vous vous asseyez sur le sol froid de la cave, loin de l'agitation du monde, pour vous laisser plonger dans ce jeu oublié.
L'écran d'accueil affiche le nom, et vous soufflez du nez :
C'est parti pour Small Town Emo.
Un faux jeu rétro
Dans ce jeu contemporain à l’esthétique GameBoy, on incarne Ken, un ado emo qui a un crush sur son meilleur ami, et qui hésite à se confesser le soir d’Halloween. C’est une aventure narrative en Nouvelle-Zélande, basée sur l’exploration, et quelques puzzles ou mini-jeux.
Actuellement, seule la démo (gratuite) est sortie, mais elle présente une grande partie du jeu et occupe tout de même 1h30 de gameplay. On peut espérer une sortie dans l’année, pour un jeu assez court, mais prenant.
L’esthétique rappelle les premiers jeux Pokémon, avec un sous-ton humoristique à la Undertale, et un sentiment de nostalgie qui peut ravir les fans de Life is Strange.
Voyage temporel dans 3, 2, 1…
Small Town Emo est une aventure cozy et nostalgique des années 2000’, ou simplement de cette période embarrassante de l’adolescence. L’histoire est linéaire et il n’y a pas de réel choix à faire, mais selon notre degré de curiosité, on peut décider d’entrer plus ou moins dans l’univers. L’astuce qu’utilise intelligemment cette démo, c’est de miser sur le design narratif par l’environnement, qu’on appelle également narration environnementale.
Chaque objet a une histoire. Chaque interaction tisse une toile, et nous embarque dans une aventure qui se construit de fil en aiguille. Tout ce petit monde devient réel, et donne chair à Ken qui a son mot à dire sur tout ce qui l’entoure. On peut alors recréer à notre guise le scénario, et mieux comprendre ce qui nous arrive. Il n’y a ni challenge ni déviation dans l’histoire, mais le jeu reste captivant, car on sent le soin apporté au détail, qui contribue à une expérience immersive et agréable. Cela donne envie de continuer à interagir avec le monde et les personnages, de découvrir chaque petit secret et de comprendre pourquoi diable il y a des memes disséminés partout dans le décor, avec des messages cryptiques ?
Ken, un protagoniste 100% emo
Ah, avoir un crush sur son meilleur pote, et ne pouvoir l’exprimer qu’en le traitant d’imbécile… Un pur plaisir. Beaucoup d’entre nous peuvent se reconnaître dans ce genre d’expérience, que ce soit parce qu’on l’a vécu, ou parce qu’on a consommé ce genre d’histoire comme des friandises beaucoup trop addictives.
Ken (de son vrai nom Kenishi) est terriblement attachant. On l’incarne, mais surtout, on le suit, et on a envie de l’encourager à travers l’écran. Ne pouvant pas influencer le cours de l’histoire, nous sommes dans une position d’observation, renforcée par la vue zénithale qui occupe une grande partie du jeu.
Le chara design arrive à rendre les personnages vivants en quelques pixels, et on capte toute leur personnalité à la mèche de cheveux près ! C’est à l’image de cette démo : simple, efficace, expressive, et tellement drôle.
La promesse de nostalgie
Comment faire un jeu “nostalgique” ? C’est une question que je me pose souvent, en tant que game designer. Il ne suffit pas de prendre des “éléments nostalgiques”, c’est une ambiance entière à faire (re)vivre. Ici, l’astuce utilisée est de remettre dans le contexte d’un moment précis : traîner avec ses potes pendant les vacances, et se préparer pour Halloween. Cette époque est retransmise jusque dans la façon de narrer l’histoire, en particulier avec l’utilisation de canaux de communication qui sont aujourd’hui obsolètes. Entre MSN ou les vieux nokias, tout est là pour nous rappeler aux années 2000. Néanmoins, point négatif, il y a beaucoup d'abréviations et de polices d’écriture qui peuvent être dures à déchiffrer… Mais sur une note plus positive, on apprécie la présence des jeux d’arcade !
En mode fanfic
Jouer à ce jeu m’a donné l’impression de lire une bonne fanfiction. L’interactivité du jeu nous permet de s’y sentir encore plus impliqué, puisqu’on est dans la fanfic, et qu’on la fait progresser. On y retrouve des thèmes très “Wattpad”, comme le crush sur le meilleur ami, la bromance ambiguë, la confession qui approche à grand pas à l’occasion d’une fête entre ados… Small Town Emo ressemble en tous points à un Boy’s Love tout mignon. Gayming Magazine rapproche d’ailleurs le jeu de la série Heartsopper !
C’est comme se plonger dans la vie de Ken, un parfait inconnu, tout en y retrouvant des tropes communs qui peuvent nous ramener à notre propre adolescence.
En bref, on a hâte d’avoir le jeu complet, pour connaître le climax de l’histoire et le déroulement de la confession ! En attendant, il faut se contenter de réécouter My Chemical Romance en boucle…
Small Town Emo (demo) by Fnife Games
ShelfLife: Art School Detective sur Steam
Toutes les images proviennent de la page Steam du jeu.